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" Mort d'un berger", le film des alpages auvergnats



Le film «  La mort d’un berger » est un drame policier, un téléfilm franco-belge réalisé en 2023 par Christian Bonnet.

Il est tourné dans le massif du Sancy au cœur de l’Auvergne dans le Puy de Dôme.  Il est adapté d’un roman de Franz-Olivier Giesbert (Editions  Gallimard, 2002) et diffusé en France en Janvier  2024.

Le destin de Nadine Bénichou, une femme du pays et vivant en région lyonnaise est  rattaché à celui des habitants d’un village de l’Auvergne quand sa mort et ses obsèques sur leurs terres soulèvent des interrogations.

Un berger Patrick Dalmas vit dans une ferme avec sa mère Marceline, veuve et figure maîtresse de ce film où le creusement des rides cache un fort feulement des sentiments aiguisés par le passage des vents au milieu des bêlements des troupeaux qu’il faut conduire aux pâturages et ramener dans leurs bergeries, un mouvement régulier observé par un  autre acteur du film : le loup.

Patrick  devait convoler en justes noces avec sa  compagne mais il meurt d’un coup mortel alors qu’il est profondément secoué par les révélations que contient une lettre qu’il a reçue la veille.

Il est retrouvé en montagne avec une morsure  à la gorge.

Le village est en émoi, se scinde en deux parties.  Il y a ceux qui mettent tous les malheurs sur le dos des loups et ceux qui connaissent les loups et savent qu’ils n’attaquent pas sans raison.


Un thriller avec Anny Duperey pour un rôle qui enracine le film dans la pierre de la terre et la pierre de l’humain, dans le pétrichor, cette odeur  qui sourd des sols après la pluie, mêlant tous les sucs devenus pâte et délivrant un effluve comme l’humain armé jusqu’aux dents pour se défendre et retrouvant dans la nature un liniment qui le réconcilie avec les outrages.

La pâte humaine, c’est ce dont est fait le film. Il ne se perd pas en séquences inutiles et faciles, chaque prise de vue est un non dit, un regard et un lien entre des êtres  qui conduit à une ouverture vers un autre monde. On n’y entre pas. On nous laisse à la lisière. Nous ne verrons que des êtres qui se croisent, qui acceptent leur sort, qui décident une seule fois et pour la vie. Marceline se sacrifie pour que la vérité reste juste.

Le film est un offertoire sur un humanisme rustique, qui se contente de peu pour développer une profondeur de ravines  dans le vertige pénétrant que donne la présence des loups.

Quand on ne sait rien encore du film  mais qu’on se laisse tenter par le titre évocateur, on entre alors dans la montagne, on n’est pas captivé mais on suit le film, on ne peut le lâcher car on veut comprendre et savoir pourquoi le loup reste la force du film. Un loup qui ne craint pas d’être blasphémé.  

On tourne autour du loup. On croit que le loup a attaqué l’homme, on lui fait porter le chapeau. Tout est dans la présence du loup filmé altier, noble, seul, silencieux sur un rocher.

Un loup qui n’approche pas mais qui observe. Un loup qui voit l’homme  jeter ses fautes sur le prochain, un loup  victime d’un injuste ostracisme mais qui ne dit rien, ne cherche pas à se venger comme s’il attendait le jugement final.

Un loup qui voit l’homme s’enliser dans ses mensonges, se contredire, s’abaisser à de perfides besognes sous le couvert de ses titres et du rang social qu’il occupe.

Un homme qui se croit protégé par les ors et les insignes de sa position de maître des lieux et seul décisionnaire.

Mais le loup veille. Il a pour les bergers la sagesse de la fidélité; pour leurs traumatismes une véritable compassion, surtout pour l'un d'eux qui est muet et ne peut se faire entendre que par les soubresauts de son âme.

On respire et on va ainsi à la rencontre de l’âme des montagnes, des pâtures et des troupeaux de bêtes.  

Ce sont les morts qui réveillent la conscience des habitants. La mort d’un berger, la mort d’une femme, la mort d’un chien, la mort d’un traître.

 Où est le mal ? Où est le bien ?

 Pour les neutraliser et trouver un autre chemin vers les hauteurs, Marceline prend et endure le destin d’un autre  pour qu’une vie intègre et intacte se fertilise.

Et celle qu’on croyait dénuée de résistance et de sensibilité, demeure à jamais tout le long du film un rocher qui ne fissure pas. Un rôle dur mais efficace et la vérité va trouver son lit ultime dans les herbes mâchées de la lande.

Un film sobre, porté par des regards, des gestes, le tout d’une beauté exigeante, de celle qui va se confondre avec les paysages  minéraux de la montagne.  

Le temps et l’espace,  tous deux infinis, font entrer dans l’humain ce qui lui manque.

 

Des critiques ont un regard différent sur le film et ne voit rien d'autre qu' "un scénario décevant, convenu et un loup qui ne sert à rien ."

D'autres critiques parlent " d'invraisemblances."

Le film reste impénétrable comme les paysages, les montagnes, les villages où l'on vient justement trouver la paix intérieure.

Il fut un temps où La Bourboule, Le Mont Dore et les pics de l'Auvergne ont donné à mon coeur un regain de confiance dans le passage des jours.


© Images du film " Mort d'un berger", 2023

Ginette Flora

Mars 2025

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