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Louise Bertin, entre musique et poésie

© olyrix- Louise Bertin


Née en Janvier 1805 à Roches, près de Bièvres dans l’Essonne, elle est décédée en Avril 1877 à Paris. C' est une poétesse et une compositrice française.

Alors que toutes ses consœurs peinent à imposer leur talent dans une société où l’œuvre d’une femme n’est pas reconnue, Louise Bertin grandit dans une famille qui l’élève dans l’amour des Lettres et des Arts. Pour la jeune fille atteinte de poliomyélite dont elle souffre dès son jeune âge, elle qui ne se déplace  qu’avec des béquilles, c’est un univers  de poésie et de musique qui s’ouvre à elle où elle peut avancer librement et y trouver une résilience.

Sa mère, pianiste, lui enseigne la musique et son père, journaliste et pendant un temps directeur d’un organe de presse, se fait un devoir de s’occuper d’elle et de lui ouvrir les voies de la création artistique. Louise grandit dans une atmosphère artistique et littéraire.

Elle compense ainsi son infirmité par une énergie mentale et cérébrale hors du commun en s’intéressant à toutes les formes d’art, peinture comme poésie, musique et écriture.

A l’âge de 14 ans, elle maîtrise les bases de la musique. Elle prend également des leçons de chant et apprend le contrepoint avec des professeurs qui ont pour élèves Berlioz et Liszt. Elle fait jouer une première œuvre musicale, un opéra « Guy Mannering » en 1825, inspiré d’un conte de Walter Scott composé alors qu’elle n’a que 20 ans et qu’elle n’a pas fini ses études musicales. L’œuvre reçoit une approbation d’estime.


Les œuvres de scène : les trois opéras


 Le loup-garou, un opéra comique en 1827





 Fausto en 1831




et Esmeralda en 1836, un opéra inspiré par le  roman de Victor Hugo, alors occupé par son Notre-Dame de Paris. Louise Bertin a composé le seul et unique opéra de Victor Hugo, une adaptation en 4 actes du roman de l’écrivain qui  écrit néanmoins un livret pour Louise à partir  de son roman mais l’œuvre n’a pas obtenu le but qu’elle s’est fixée. Montrer qu’une femme pouvait parvenir jusqu’aux marches les plus hautes de la confrérie musicale en représentant une pièce à l’opéra. Il n’y eut que 6 représentations.



« L’opéra est un art viril et non une affaire de femmes. »  dit-on au XIXème siècle.  

Victor Hugo a déjà des détracteurs concernant son roman et la composition musicale en subit les malencontreux contrecoups. La cabale est féroce quand bien même Berlioz et d’autres amis trouvent des qualités à l’œuvre de Louise  qui souffre de n’être aux yeux du regard critique qu’une femme infirme compensant son handicap par des envolées lyriques perçues comme un exutoire à ses souffrances intimes. Berlioz a beau louer les hardiesses techniques de l’œuvre musicale, les malfaisants la montrent du doigt et font circuler une rumeur perfide. Berlioz aurait-il écrit la partition ?

 L’échec d’Esméralda décourage Louise qui se détourne de l’opéra et de toute scène lyrique.


L’œuvre est oubliée pendant plus de 150 ans, son auteure également.  On pouvait se réjouir de découvrir cette pièce  quand en 2008 un concert reprend les airs d'Esmeralda. C'est une version concert proposée à Montpellier. L'air de Quasimodo, la romance d'Esméralda et le duo entre Frollo et la bohémienne remirent en mémoire l'histoire de Notre-Dame de Paris. 


En novembre 2023, au théâtre des Bouffes du Nord à Paris, l’opéra de Louise Bertin est représenté. Victor Hugo en a écrit le livret certes mais il ne se serait pas attendu à ce que certaines scènes soient jouées avec outrance. Les spectateurs choqués, atteints dans l’idée qu’ils conservaient du roman et de la comédie musicale, se retirent. Louise Bertin, une fois encore, de son firmament, doit se tordre les mains  en voyant sa pièce dénaturée. 

    

Les œuvres pour piano


 Elle se met à composer des musiques de chambre :

12 cantates, 6 ballades et 5 symphonies restées en manuscrits.

Un Trio pour piano

 Hirondelle dont les paroles sont de Lamartine.

 Reviens , une fantaisie pour piano  sur une romance (1878)

 


Poésie : son œuvre unique se décline en deux volumes « Les glanes 1 » en 1842 et  « Les  nouvelles glanes 2 » en1878.


L'herbe cueillie à la montagne,

Près de la violette en fleur,

Nous rappelle de sa compagne

Et le parfum et la couleur ;

Elle ramène à notre oreille

Les bruits errants sous les grands pins,

Et du troupeau qui se réveille

La clochette aux sons argentins.

***

Mais, hélas ! Ici tout s'efface !

Couché dans l'herbe, le lac pur

Garde d'abord à sa surface

Les vives couleurs de l'azur .

Et dans le flot clair qui l'arrose,

Timide, l'églantier fleuri

Ose à peine mirer sa rose

Ou baigner un rameau flétri.

 Louise Bertin – Les glanes

 

C’est le recueil de la mélancolie, des rêves vivaces. Elle comprend et réalise qu’elle a besoin des mots pour exprimer ce qu’elle éprouve. Les glanes, ses poignées d’épis ramassées sur les champs après les moissons, sont couronnées par l’Académie Française en 1842.  Elle laisse une pensée directrice, filant sur les pages, l’idée que rien ne dure.

   

Après son retrait de la scène, elle réintègre le domaine familial  Les Roches, où elle se réfugie au calme  au milieu des prairies où coule une rivière. Paysages propices au rêve et aux évocations paisibles.  Louise écrit ses hymnes, son frère est paysagiste, il donne à la nature une voix que la musicienne sait entendre.  Elle rassemble ses poésies dans un recueil intitulé Les glanes  pour évoquer ainsi les moissons qu’elle récolte au cours de sa retraite. Quelques amis viennent l’écouter, des amis sûrs qui l’accompagnent dans sa quête de la beauté. Elle tient salon, reçoit poètes et musiciens. Victor Hugo ne l’oublie pas. Il  lui écrit quelques chants  dans  son dernier recueil «  Feuilles d’automne ».

Les poètes qui la visitent mettent des paroles sur sa musique. Lamartine écrit sur  « L’hirondelle » et Hector Berlioz lui dédie la première version pour chant et piano de son cycle de mélodies : Les nuits d’été, op 7 en 1841, des mélodies composées sur des poèmes de Théophile Gautier.


Louise Bertin, une figure discrète que le temps couvre d'élégance et de simplicité.

 

©  Lettre de Victor Hugo, 2 déc. 1841 à la parution de « Glanes »

© Lettre de la comtesse Bawr dans ses Souvenirs en 1853



Ginette Flora

Mai 2025

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