Louisa Paulin, la poétesse du Tarn
- Ginette Flora Amouma
- 25 janv.
- 5 min de lecture

Louisa Paulin (1888-1944)
C’est une écrivaine, poétesse, institutrice de l’école élémentaire. Elle est née en 1888, a grandi et vécu dans son village natal : Réalmont, dans le département du Tarn situé dans la région de l’Occitanie.
La région "Occitanie" englobe plusieurs départements dont le Tarn et ses deux villes Castres et Albi.
Le Tarn est entouré des autres départements comme le Tarn et Garonne, le Lot, l’Aveyron, la Lozère et le Gard dans ses limites Nord et le Gers, la Haute-Garonne, l’Aude, l’Hérault, les Pyrénées Orientales, l’Ariège, les Hautes Pyrénées dans ses limites Sud.
Le Tarn est enclavé dans les terres, les rivières, les roches calcaires et les plateaux comme L’Aubrac. Castres et Albi ses principales villes, gardent en mémoire les noms de Toulouse-Lautrec et de Jean-Jaurès. Le Lot sinue entre les villages, dans ce décor déchiré qu'est le plateau volcanique qui attire maints artistes peintres et poètes.
Le Tarn n’a pas de vue sur la Méditerranée. Nous sommes en présence de villages qui sont ceints de ciel et de terre, retirés entre des fortins de pierre, parcourus de forêts et de parcs naturels. Il faut bien se rendre compte des paysages du Tarn pour comprendre l’œuvre de Louisa Paulin.

Son parcours d’enseignante
Elle grandit dans une famille paysanne qui parle l’occitan. Elle apprend le français en fréquentant l’école communale, poursuit ses études jusqu’à entrer dans l’Ecole Normale des Instituteurs d’Albi et peut ainsi embrasser la fonction d’institutrice dans les différentes écoles du Tarn.
Mariée en 1908, après avoir perdu 3 enfants en bas âge, elle divorce en 1912 et passe le concours de l’Enseignement Primaire Supérieur d’Albi puis est nommée professeure.
La poétesse
A partir de 1928, elle commence à écrire et publier ses contes et des chroniques de sa terre natale. Elle rassemble chants et récits traditionnels pour en faire un recueil :
« La vie limousine »
Une grave maladie la neuropathie amyloïde la conduit progressivement à une cécité partielle d’abord puis totale puis à la paralysie, une infirmité qu’elle traverse avec vaillance mais dont ses poésies lyriques rendent la discrète détresse.
La retraite
Elle prend sa retraite en 1932 dans son village natal mais ne renonce pas pour autant à ses activités littéraires. Elle étudie l’occitan et commence à publier ses ouvrages. Elle dicte ses poèmes quand elle se sait privée de ses yeux. Elle s’engage dans une correspondance régulière avec ses homologues, poètes et auteurs qui l’encouragent et lui font sentir que sa délicate présence est un dictame pour les isolés du genre littéraire.
Elle écrit beaucoup, des poésies, des chroniques pour des revues locales, des correspondances. Elle complète également un journal qui nous renseigne sur la traversée de ses révoltes intimes.
1936 - Fragments d’une symphonie d’automne
1937 - C’est le poème en occitan « Cant d’ibern » qui est remarqué et couronné par le prix de l’Académie des jeux floraux.
C’est à la faveur de ce prix que Louisa Paulin correspond avec le poète Antonin Perbosc qui l’avait remarqué au concours. Les deux poètes entretiennent dès lors une correspondance régulière sans jamais se rencontrer.
1940 - Elle publie Sorgas, un recueil de poésies qui évoque l'univers de son enfance mais aussi l'histoire tragique des Albigeois.
Extrait de Sorgas :
" Comme le jardin où a fleuri une dernière rose
Le jardin tout gâté par la pluie et dévasté par le vent
S'effraie de cette fleur printanière,
Mon âme t'inonde de ses pleurs, ô pauvre amour tardif,
Et tremble en m'entourant
De ses deux ailes pressées."
1942 - Fresca qui évoque l’occupation allemande.
1944 - Elle meurt quelques semaines avant Antonin Perbosc. Tous deux laissent une correspondance que Louisa Paulin résume ainsi :
« Des Dieux, vraiment, voilà ce que nous sommes, quand je prends mon papier et vos livres. Ce que j'écris, c'est vous et c'est moi, et sans vous, jamais je n'aurais pu être moi. »
La poésie de Louisa Paulin
Sa poésie est profondément lyrique. Elle devient intimiste quand la poétesse sombre dans la détresse et réaliste quand des sursauts de lucidité la ramènent à la vie et la maintiennent dans une relative joie de vivre. Sa solitude, elle l’accompagne de la profonde dévotion qu’elle accorde à la littérature et la culture de l’esprit vivant dans les racines de chaque être humain.
Elle réinvente le chant de la terre.
En 1970, des ensembles musicaux de chanteurs et musiciens la découvrent et mettent en musique ses poésies.
Le groupe de musique occitane, la Talvera, originaire de Cordes sur Ciel met en musique 21 poésies de Louisa Paulin.
Cançons del silence, 1996 .
Elle figure parmi ces poètes dont on parle peu et qu’il est bon de fréquenter, d’aller sur leurs pas car auprès d’eux, on réjouit une âme, celle de la nature où tout s’installe, vie, joie, peine, mort. Qui est-elle ?
Elle le dit elle-même :
« Je suis née le 2 décembre comme Francis Jammes.
Un dimanche comme Mélisande.
Et en 1888 comme beaucoup d’autres gens.
Mon pays est l’Albigeois et ma langue maternelle n’est pas le français mais la langue d’oc.
C’est en langue d’oc que j’ai entendu les premiers vers, ceux de nos chansons populaires. Et j'ai gardé de ma petite enfance le sentiment que la poésie n'est que chant
Et qu'elle ne saurait être le privilège de quelques-uns, mais le bien de tous,
Comme nos chansons populaires et les psaumes de nos offices. C'est peut-être pourquoi j'ai toujours rêvé d'écrire des poèmes avec les mots de tout le monde, avec les mots de tous les jours, usés, mais riches de leur éternelle charge de misères et de joies. C'est ce que j'ai tenté...
Et je rêve aussi d'un temps où on pourrait non pas vendre des poèmes, mais les donner, comme les fleurs des champs que chacun peut cueillir. »
En conclusion, il y a ce livre " Paulin-Perbosc " qui délivre le néant. Les Editions Vent Terral écrivent ceci :
Auteur(s) Louisa Paulin (Auteur), Antonin Perbosc (Auteur)
Editeur(s) Vent Terral
Date de parution : 24/11/2007
Quatrième de couverture :
Correspondance
Louisa Paulin
Antonin Perbosc
1937 : Louisa Paulin envoie l'un de ses poèmes au jury de l'académie des Jeux Floraux. Antonin Perbosc le remarque. S'ensuit une correspondance qui se poursuivra jusqu'en 1944, l'année de leur mort. Discussions de lettrés heureux de converser avec un alter ego en poésie qui force sans cesse l'admiration, qui ravit, qui étonne. En toile de fond, tout le milieu félibréen et occitaniste qui est le leur. Et bien souvent l'histoire - les années Trente, la guerre, l'Occupation - qui vient bousculer ce petit monde de lettrés.
Un « échange d'âme » qui se construit au fil des années. On voit d'abord passer, au fil des lettres, des humains qui ne sont point des poètes, mais des parents, des voisins, des amis. Peu à peu, sans qu'on y prenne garde, l'écriture devient intime. Louisa était faite pour être heureuse. La maladie l'oppresse, mais la beauté d'une rose, l'envol d'un poème savent donner la joie. « Je n'ai qu'un amour, la beauté » écrit-elle. Vient l'amour de celui qui la crée, le poète talentueux, et vient le bonheur - si parfait - d'une communion spirituelle.
Louisa Paulin et Antonin Perbosc ne se sont jamais rencontrés, mais leur « amor de lonh » est l'union de deux êtres, ravis dans un ailleurs, « les temps inexistants », par la musique de l'âme et des mots. C'est un ultime appel au bonheur, une douce lumière du soir.

Ginette Flora
Janvier 2025
j'ai tout adoré ... Merciiii "« Des Dieux, vraiment, voilà ce que nous sommes, quand je prends mon papier et vos livres. Ce que j'écris, c'est vous et c'est moi, et sans vous, jamais je n'aurais pu être moi. » ❤️
Un grand merci pour cette 😍magnifique découverte, Ginette !
Une femme courageuse et inspirée par la langue occitane qu'elle a porté haut et fort.
J'aime beaucoup son poème sur les quatre saisons. Une belle illustration d'une année.