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Les deux gisants

 

Vint le jour imprudent où il fut dénoué

Par une main tremblante d’un désir avide

Le bliaud de cendal pourpré qu’elle portait

En croisillons lacés sur sa jeune poitrine.

Elle la couvrait vainement de ses paumes moites

Trahissant un émoi mêlé de confusion.


La ceinture d’orfroi brodée d’or enlevée,

La jouvencelle chaste perdue dans ses rêves

Laissa choir l’étoffe, la chainse chiffonnée,

Le dernier rempart de l’étreinte fusionnelle.

Ils furent saisis d’une passion invincible

Qu’ils brûlèrent tel un tison incandescent.


Insatiable, l’ardeur les embrasa si fort

Qu’ils succombèrent à un bonheur ébloui.

Ils rirent des rumeurs, ils fuirent les abîmes

Laissant leur esprit au bord d’un choix ultime

Révélant à l’un, son avenir sacrifié

Et terrible, à l’autre, son chemin de croix.


Elle réclama d’être couchée dans son voile

Sur le tombeau de son époux tout contre lui.

Le temps cessa de vouloir souffler leur hymen.

Le Seigneur céda aux appels de leur douleur

Pour accepter d’unir entre les deux gisants

Le soupir d’Abélard au credo d’Héloïse.


Poésies de l'évocation des oeuvres littéraires et artistiques

Ginette Flora

Mars 2019

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