"Le contre-ciel "de René Daumal
- Ginette Flora Amouma
- 15 avr. 2022
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 20 janv.

Poète et conteur, indianiste et essayiste, traducteur et écrivain. Né en 1908, dans les Ardennes comme avant lui , un certain Rimbaud. Tous deux portent le stigmate du poète maudit inscrit au fer rouge sur leur nom.
Disparu prématurément en 1944, à l'âge de 36 ans, Daumal est longtemps resté dans l'ombre.
Après des études à Paris, il s'engage dans des créations littéraires où il libère le langage de ses codes traditionnels.
Pour ce faire, il s'initie à toutes sortes de lourdes expériences qui font fureur dans les cercles artistiques où il se lie d'amitié avec des auteurs qui fondent un cercle de poètes.
Il se livre à des excès, il use de moyens outranciers pour atteindre des paradis artificiels.

" Le contre-ciel"
est un recueil de poésies, univers sombre et lugubre, soudure d'une écriture qui vit "de la nuit de chaque jour ".
La recherche d'une esthétique libératrice des canevas convenus, la montée vers une vérité transcendantale le jette dans des expériences dangereuses qui fragilisent sa santé.
Il fonde une revue "Le grand jeu"
" Je vais vers un avenir qui n'existe pas
laissant derrière moi
à chaque instant
un nouveau cadavre "
Poésie noire et blanche
il est à l'affût d'une quête spirituelle."
Sa poésie teintée de surréalisme, versée dans l'interrogation mystique ne le satisfait pas. Sa pensée reste lucide.
Il se détache de ses compagnons quand il comprend

que sa route, il ne peut la suivre que seul. Y-a-t-il quelque chose ailleurs ? Il se tourne vers le védisme, la culture orientale, apprend le sanskrit, se plonge dans l'étude des textes sacrés.
Il écrit :
La langue sanscrite , il fouille dans la grammaire de la langue des origines.
Bharata , il côtoie la poésie des musiciens orientaux.
Il boit à la source d'une écriture mystique, devient traducteur puis enseignant.
Il se heurte à une impasse. La vérité est ailleurs et il cherche.
Il a besoin d'altitude, d'élévation spirituelle et réelle . " Qui a soif me suive"

Il s'adonne à l'alpinisme, se passionne pour les expéditions en haute montagne. " La porte de l’invisible doit être visible Est-il mort le secret perdu dans Atlantis ?"
Il cherche son origine. Cette quête fait de lui un conteur.
Patti Smith dans sa préface, dit de lui :
" C'est un conteur inouï, absurde et spirituel. Son écriture en noir et blanc, en blanc et noir fait l’éloge de la révolte :
" je vous parle sans amour, sans passion "
Il incarne une forme de révolte spirituelle. Il voyage vers la culture orientale, ce qui révèle l'impasse d’une certaine révolte qui se soucie de la tradition mais espère une révolution du verbe. Les chercheurs d’écriture sauront s'arrêter devant son
- recueil de poésies : Le contre-ciel
- ses deux contes : La grande beuverie et Les monts analogues
- et des essais : l'évidence absurde et les pouvoirs de la parole

" Le monde ne suffit pas. La nuit de chaque jour, il suffit d'un mot "
Le contre-ciel
Il suffit d’un mot
Nomme si tu peux ton ombre, ta peur et montre-lui le tour de sa tête, le tour de ton monde et si tu peux prononce-le, le mot des catastrophes, si tu oses rompre ce silence tissé de rires muets, — si tu oses sans complices casser la boule, déchirer la trame, tout seul, tout seul, et plante là tes yeux et viens aveugle vers la nuit, viens vers ta mort qui ne te voit pas, seul si tu oses rompre la nuit pavée de prunelles mortes, sans complices si tu oses seul venir nu vers la mère des morts – dans le cœur de son cœur ta prunelle repose – écoute-la t’appeler : mon enfant, écoute-la t’appeler par ton nom.
(René Daumal)
Ginette Flora
Avril 2022
Merci Ginette pour cette découverte. Un "cherchant" comme je les appelle.