La page d'Odile - Au cimetière

Ginette Flora Amouma
29 avr.
2 min de lecture

Durant les vacances, ma grand-mère nous emmenait, ma cousine et moi, au cimetière.

Pour nous, les petites de 5 et 6 ans, c’était la récréation.

On avait appris avec le temps à nommer les tombes qu’elle devait entretenir pour que le dimanche, les parisiens qui lui donnaient 3 francs 6 sous, trouvent les tombes impeccables lors de leur monologue avec leurs chers disparus.

Catherine et moi jouions dans le jardin des morts. Bon, pas le droit de sauter sur les tombes mais le devoir de ramasser les escargots et le droit plus discret de prendre les perles de rocaille, qui, à l’époque, tissaient les croix énormes et colorées « pour faire briller l’esprit des morts ».

C’était la mode, à cette époque.

Le plus discrètement possible, on faisait glisser les perles dans nos poches et, de retour à la maison, on se faisait des colliers.

Et les escargots, ça, on avait le devoir de les ramasser. Dès qu’il avait plu, Mémère nous disait :

– Les filles on va aux escargots.

Nous filions au cimetière et autour du calvaire au bout du chemin pour remplir la bourriche.

De retour à la maison, mon grand père l’accrochait dans le poulailler et les escargots bavaient quelques jours avant qu’ils ne disparaissent ….Je ne me souviens plus si on les mangeait ou si mes grands parents les vendaient pour arrondir leur fin de semestre… oui de semestre car mon grand père travaillait dans une petite exploitation agricole et ne percevait ses salaires que 2 fois par an, à la fin de chaque saison.

Quand nous jouions dans le cimetière, nous demandions à notre grand-mère ce qu’il y avait sous le grand couvercle en fer gris posé au sol dans un coin isolé.

Un jour, elle a fini par céder à notre demande et a soulevé cette plaque grise…

Des os, des os, que des os !!!

– Qu’est ce que c’est ? demande Catherine.

– Ce sont les morts qui n’avaient pas assez d’argent pour rester enterrés tous seuls longtemps.

– Ben, comment il va faire le Bon Dieu pour retrouver tous les morceaux quand il reviendra sur terre pour réveiller les morts ?

Et voilà le catéchisme était passé par là, dans nos têtes, dans nos façons d’imaginer une mort qui ne durerait pas !!!