Ce matin

Ce matin comme les autres que j’ai versés

Au fond d’un café à l'anse cabossée

Que j’ai tous deux renversés pour ne tenir

Au bout des doigts que la goutte affolée

Ce matin je l’ai vu et j’ai souri au vent

Qui dans mes cheveux me clignait des yeux

C’était lui qui fuyait ou c’était moi qui riais

Il y avait un écho railleur qui me signalait

Que l'entretien commençait dans les plantains

Il me poussait me poussait jusqu’à ce matin

M'a-t-il vu me laisser choir sur le vieux banc

Poser ma main sur le bois des complies

M'a-t-il dit que la peur pouvait être franchie

Et m'a-t-il vu écrire ce que le ruisseau

Charrie sur les cailloux sans s’arrêter

Les aubes aiment chambrer les matineux

D'une giclée de bulles passagères

Qui pétillent sur les cuillères

M'a-t-il vu camoufler mon visage

Mes deux mains fermées sur mes yeux encombrés

Que crains-tu ? semblait-il dire d’un air taquin

On t’a vu courir sur l’herbe sauvage

Voir les fleurs qui naissent sur ton matin

Te délivrer de la lune qui t’épuisait

Ce matin comme les autres que j’ai goûtés

Était-il passé l’ai-je bousculé le vent

Qui espère qu'on l'attrape qu'on se l'attache

Que je ramène dans ma tasse sa ballade

Quand je viens y prélever ma sonate

Janvier 2024

Ginette Flora