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"Tous les matins du monde", film d'Alain Corneau

Dernière mise à jour : 22 janv.

C'est un film sorti en 1991, d' Alain Corneau et qui a remporté plusieurs récompenses.

Il redonne à la musique baroque ses lettres de noblesse et fait découvrir la viole de gambe, un instrument peu usité.

Les oeuvres de Marin Marais et de Jean de Sainte-Colombe traversent le film, la musique baroque s'attache à donner aux regards et aux gestes un lyrisme fervent que ni l'austérité d'un langage retenu ni les couleurs en jeux d'ombre ne parviennent à éteindre.

Le film baigne dans une mélancolie qui va vite confiner au tragique, une bougie éclaire faiblement les murs et sur une table des objets rappellent une présence disparue, sa voix, son chant hante les esprits au point que le présent se disloque ... n'est ce pas surtout un hymne au temps qui passe ?


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Le scénario est tiré d'un roman de Pascal Quignard : " Tous les matins du monde ".

L'histoire retrace la vie du compositeur français du 17ème siècle, Marin Marais quand il rencontre un autre compositeur français Jean de Ste-Colombe et sa famille, Madeleine et Toinette ses filles et l'ombre de la défunte Mme de Ste-Colombe.

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Guillaume Depardieu joue le rôle de Marin Marais et Jean-Pierre Marielle, celui de Jean De Ste-Colombe.

L'interprétation d'Anne Brochet, lovée dans son univers de rêves et d'absolu est magistrale.

Le film emprisonne chaque rôle dans un canevas trouble que les personnages peinent à déverrouiller.

Tous enchaînés découvrent peu à peu ce qu'est la réalité.


L'intrigue s'attache à suivre la vie de Marin Marais dans sa jeunesse, son passage dans la vie des Ste-Colombe, les irréparables drames qu'il a laissés et comment malgré les terribles épreuves, les protagonistes laissent la musique panser les blessures.

A la fin de sa vie, Marin Marais, incarné par Gérard Depardieu, raconte ses souvenirs de jeunesse et les cours que lui a dispensés son maître le musicien Ste-Colombe.

Marin Marais, 17 ans, se présente chez Ste-Colombe, un homme austère, vivant dans le souvenir de sa défunte femme et cherchant dans son art le liniment de ses souffrances.

Il est peu facile d'accès, bourru, rude et très peu amène.

Marais exécute une aria de sa composition et le maître accepte de le prendre pour quelque temps.

Marin et Madeleine se rapprochent mais le jeune Marin, déjà entré dans la grande vie en parle avec une verve que n'apprécie pas Ste-Colombe, janséniste et très peu porté sur les mondanités. Il casse la viole et chasse Marin mais Marin avec la complicité de Madeleine revient travailler dans l'atelier de Ste Colombe.

Marin est en pleine gloire, il s'enrichit des secrets du maître. Découvert et chassé, il va à la conquête de sa vie car il est promu musicien de la chambre du roi.

Il se détache de Madeleine qui tombe malade, Ste Colombe s'oblige à rappeler Marin qui montre son vrai visage. Madeleine qui comprend qu'elle s'est trompée et que Marin n'est qu'un mondain imbu de sa personne, se suicide.

Ste-Colombe, après l'avoir banni, toutefois lui pardonne et les deux musiciens que la mort de Madeleine a considérablement mûri, s'accordent un temps de paix tandis que Marais retourne à la cour.


Le film a contribué à faire connaître la musique baroque et l'instrument, la viole de gambe joué par Jordi Savall.

Les musiques de Marin Marais et de Sainte-Colombe interprétées dans le film par Jordi Savall sont un pur joyau :


Les pièces de Marin Marais :

- Les folies d'Espagne

- Le badinage

- La rêveuse

- L'arabesque

- Tombeau pour Mr de Ste Colombe

- Sonnerie de Ste Geneviève du Mont de Paris ( à lire l'article de Philippe sur Marin Marais avec ma contribution pour le texte, juin 2023 )


Les pièces de Sainte-Colombe :

- Gavotte du tendre

- Le retour

- Les pleurs

[ Qui est là qui soupire dans le silence de la nuit ?

– Un homme qui fuit les palais et qui recherche la musique. »

Monsieur de Sainte Colombe comprit de qui il s’agissait et il se réjouit. Il se pencha en avant et entrouvrit la porte en la poussant avec son archet. Un peu de lumière passa mais plus faible que celle qui tombait de la lune pleine. Marin Marais se tenait accroupi dans l’ouverture. Monsieur de Sainte Colombe se pencha en avant et dit à ce visage :

« Que recherchez-vous, Monsieur, dans la musique ?

– Je cherche les regrets et les pleurs. » ]

(Pascal Quignard, Tous les matins du monde, Gallimard, 1991.)


J'avais fait une ébauche de cet article le 8 juin 2021, en pensant que viendrait l'occasion de m'y remettre, une fois que je serai bien entrée dans la musique baroque pour pouvoir émettre un avis personnel.

Et voilà qu'en ce mois de Juin 2023, Philippe, un auteur et mélomane du blog me demande de présenter un lien : " La sonnerie de Ste Geneviève du Mont de Paris " , de Marin Marais.

Mes souvenirs refoulés ont déferlé et je reprends cet article que j'ai écrit sur "Tous les matins du monde " , je le complète et je sais que le temps que je l'ai laissé n'a pas été vain.

Vient un moment où l'on comprend pourquoi on a commencé une symphonie sans pouvoir l'achever comme si la pièce attendait de trouver sa pleine mesure.

Juin 2023

Ginette Flora

15 commentaires


Membre inconnu
24 juin 2023

Merci Ginette.

J'ai eu la chance, avec ma tendre et douce, de voir ce film la première fois dans un cinéma toulousain en avant première avec Alain Corneau et J.P.Marielle. Un bon souvenir, surtout de la discussion qui a suivi dont une partie portait sur les absents, Depardieu père et fils (quelle belle idée de les avoir réunis) d'Anne Brochet, et de Jordi Savall.

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C'est en effet un beau moment que vous avez vécu .

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Fournier Viviane
Fournier Viviane
23 juin 2023

❤️je l'ai vu ce film et tu nous le fais revivre avec élégance et juste envie de le revoir ...Merci à Toi

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C'est un film qui nous a tous marqués.

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Colette Kahn
Colette Kahn
23 juin 2023

Avec ton texte, Ginette, je retrouvé avec bonheur la beauté de ce film que j'ai vu plusieurs fois et le poème de Pascal Guinard est si beau. Dommage que Gérard Depardieu dont le talent était immense (dans les films de Maurice Pialat notamment : "Sous le soleil de Satan") se soit perdu dans ses outrances...

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Membre inconnu
24 juin 2023
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Quand un géant se perd, son ombre devient celle d'un nain, pure image, sans vouloir le moins du monde chagriner les personnes de petite taille, cela va sans dire... mais tellement mieux en le précisant.

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berliner.randolph
berliner.randolph
13 sept. 2021

J'avais vu le film lors de sa sortie, j'ai dû le revoir trois fois, malgré le ton lugubre. Ne serait-ce que pour le jeu de Jean-Pierre Marielle et le son de Jordi Savall !


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Membre inconnu
24 juin 2023
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Merci merci du lien...

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