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Marie de Sormiou, femme de lettres

Dernière mise à jour : 21 janv.


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C'est une poétesse française, née en 1865 à Paris et décédée en novembre 1956 à Marseille, à l'âge de 91 ans.

Son père Charles Buret achète en 1876 la calanque de Sormiou pour en doter sa fille Marie lorsque celle-ci épouse en 1885 l'écrivain Alfred de Ferry, un provençal. Les deux époux s'installent dans leur résidence marseillaise, une bastide nommée " La Magalone" où ils aiment recevoir les grands esprits de l'effervescence culturelle de ce temps : Frédéric Mistral, Anna de Noailles...

Alfred de Ferry fait construire une résidence secondaire dans la calanque de Sormiou. C'est une bâtisse nommée " Le château" où Marie aime s'y rendre à cheval pour écrire et peindre.


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Il est dramaturge, elle est poète et se voit nommée Marie de Sormiou pour ses activités artistiques et linguistiques. Elle participe aux travaux du Félibrige, une association dont le but est de sauvegarder et de promouvoir la langue d'oc.

Son œuvre se distingue par deux inspirations :

- La première est tout entière tournée vers la contemplation des beautés de la nature, celle des calanques, de la flore environnante et des sentiers de la côte méditerranéenne.

La tonalité est lyrique, un panthéisme fougueux anime ses vers dans ses premiers recueils de poésie considérés comme des oeuvres païennes :

"L'offrande aux dieux"

"Les chants de soleil"

"Ode à la Provence"


Quelques extraits :


Marie de Sormiou (1865-1956)

« Ô Terre du Midi dont mon cœur s'éblouit ! Ô Terre où ma tendresse enfin s'épanouit ! »


Je suis de race de faunesse

La terre m'eut d'un demi-dieu

J'ai dans mon cour la robustesse

Du sol tenace et vigoureux


dans mon âme sont les essences

Des résines et des lauriers

J'ai dans ma force les silences

Et les songes des hauts palmiers


L'Inconsumable

Flamme qui brûle au cœur tant qu'on vit, nuit et jour,

Sans jamais changer en de la cendre incolore

Un seul rouge tison ! Un seul supplice! Amour

Qui ne consume rien du bûcher qu'il dévore!


LE PIN DE PROVENCE


D'un mouvement doux l'arbre mélodique

Murmure, murmure aux calanques d'or.

Au ciel, à l'été ce rythme lyrique

Que sa branche sait !... Et même quand dort


La terre à midi va cette cadence...

Eventement d'aile au parfum d'azur !...

Il semble qu'il berce un rêve très pur,

Le pin de Provence !


et un autre poème qui exprime l'exaltation qui l'habite. C'est une fusion avec la nature qu'elle déclame :


J’ai même sang que vos ramures

Vous me portâtes en vos flancs

Sylvains aux douces chevelures,

Pins qui chantez sur les rocs blancs


Les vieux chênes sont mes ancêtres

Leurs troncs renferment mon passé

J’y vois dormir d’agrestes êtres

Dont, branche neuve, j’ai poussé


Dans mes veines n’est qu’une sève

Celle qui rend les printemps verts

Elle ruisselle de mon rêve

Pour revenir à l’univers


Je vis de ce divin échange

Que nous faisons, la terre et moi,

Je meurs quand la cité de fange

Ô Nature ! M’enlève à toi.


Mi-végétale, mi-dryade,

Sur les mousses qui boivent l’eau

Je deviens l’herbe et la cascade

La source vive et le roseau


Pour l’homme, je suis l’étrangère

Je l’ignore ou ris de ses pleurs

Je ne sens que par la bruyère

La colline rude ou les fleurs


Je suis sauvage et dans ma bouche

J’ai le goût de la liberté

Quand je donne sur votre couche

Ô Pan, le baiser de l’été.


Ce baiser mord, dieu de la terre

A votre chair comme en un fruit

Mes tendresses ont la colère

de la famine qui détruit


Je suis de race de faunesse

Mes pieds agiles et grimpants

Savent vos danses à l’ivresse

Ô bonds légers des Egypans !

Marie de Sormiou


- La deuxième inspiration est nettement plus mystique. Marie découvre le message de St François d'Assise lors d'un voyage en Italie. Ce fut pour elle une révélation. Elle s'éloigne des mondanités et partage sa vie entre Paris et sa résidence de Magalone.

Elle écrit :

" La joie aux pieds nus " , les chants du voile, le chant du miroir, c'est la trinité d'une poésie d'élévation spirituelle.

et "le Cantique "

où elle célèbre l'humble parure des émerveillés de Dieu.


" Croix qu'on porte avec soi sur les chemins perdus

Et qui monte où l'on monte et s'arrête où l'on tombe

Où l'on râle, écrasé sous tes bras étendus

Sous les bras de gibet aux pesanteurs de tombe. "

En 1927, elle devient veuve et se remarie avec Gustave Bonnegrâce de Canolles.

Elle consacre sa vie aux diverses activités artistiques comme la peinture, la musique et les joies champêtres.

Elle meurt le 6 novembre 1956 à l'âge de 91 ans. Certains lieux de Marseille portent son nom ( rue, avenue, impasse...)

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L'évolution de la calanque de Sormiou depuis le décès de Marie de Sormiou

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Sormiou est la plus grande des calanques qui existent entre Cassis et Marseille. L'eau y est d'une transparence magique.

A son décès, la calanque est gérée par les descendants de Marie jusqu'à ce que les arrière- petits-enfants se regroupent en SCI pour continuer de gérer le Château devenu un restaurant et le centre de loisirs qui s'y est implanté. C'est évidemment pour la famille un endroit riche en souvenirs qui est devenu un lieu mythique avec son château et ses cabanons.


Les 17 premiers cabanons qu'Alfred de Ferry a fait construire en même temps que le château ont prospéré et on dénombre désormais 127 cabanons, limite fixée par les décisionnaires de la province.

Les cabanons, de par leur présence atypique, engendrent une légende. On y cultive un art de vivre au plus près de la nature. Ce sont les pêcheurs du village voisin de " Mazargues " qui les occupaient en y entreposant leurs filets et leurs affaires.

Par la suite, ce sont des retraités qui font vivre les cabanons à l'année et les transmettent de génération en génération. On y vit dans des conditions améliorées et non plus dans les conditions frustes de l'époque où les cabanons n'offraient ni eau ni électricité.


Depuis 2012, Sormiou fait partie du Parc National des Calanques et sa fréquentation est surveillée depuis que des départs de feu inquiètent la région. Les barbecues sont interdits et l'unique restaurant " Le Château " est soumis à des conditions d'exploitation draconiennes qui le privent de sa clientèle pendant les jours sensibles de l'été.

La résidence secondaire de Marie est donc devenue un restaurant et la famille Rambaldy en est le propriétaire depuis trois générations. Les chefs mettent un point d'honneur à préparer une cuisine traditionnelle du bon terroir provençal et si les vivres arrivent par transports motorisés, la famille ne se prive pas de raconter comment à l'époque, il fallait acheminer la nourriture par caravanes d'ânes sur le chemin resté célèbre des muletiers.


Le restaurant " Le Château"

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Le chemin des muletiers

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Août 2023

Ginette Flora




10 commentaires


Fournier Viviane
Fournier Viviane
25 août 2023

❤️Une surprise, une histoire de vie qui décalque la vie ... superbe découverte, merci Ginette

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Il faut dire que moi-même je n'en reviens pas d'avoir découverte Marie de Sormiou !

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Colette Kahn
Colette Kahn
14 août 2023

Double découverte pour moi... je me sens si "petite" mais aussi éblouie devant tant de beauté et de talent... merci Ginette !

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Une découverte pour moi aussi, Alice...et cela s’harmonise si bien avec le thème des calanques !

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berliner.randolph
berliner.randolph
14 août 2023

Un véritable bonheur de retrouver Sormiou, arpentée tant de fois, avec ou sans appareil photo !

Quelle joie, mêlée de honte, de découvrir la poétesse. Rustre que je suis, je n'ai fait que randonner en ces lieux, ignorant tout de Marie. Ton iconographie est généreuse, je vérifie si l'une ou l'autre de mes photos peut apporter une touche particulière...et vous faire découvrir des passages intéressants.

Eh bien, nous voici en décembre 2015, par un jour de mistral fort et glacial. Je me protège comme je peux...et nous partons du petit port des Goudes. Nous allons passer un raidillon qui surplombe le port, marcher jusqu'à une petite plage, abandonnés pendant l'hiver. Puis revenir saluer les mouettes..


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Je ne sais si je dois rire ou pleurer !

Comment ai-je atterri à Sormiou ? Et tout cela par les sentiers de la littérature !

Le but ultime est le même : se rapprocher le plus possible d'un idéal à contempler !

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Tinouch
14 août 2023

Merci Ginette, j'ai découvert le destin de Marie de Sormiou, je connaissais mieux la calanque que son histoire !

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Ce fut une surprise aussi pour moi que de me trouver au milieu d'une histoire de calanques !

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nicole.loth
nicole.loth
14 août 2023

Que de romantisme dans ce récit Ginette. Marie Sormiou est une femme de lettre remarquable au destin peu commun. Je suis heureuse de connaître son histoire, ainsi que la découverte de cette belle calanque bien préservée... Merci pour cela.

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Je suis très heureuse de partager mes lectures et la découverte de Marie de Sormiou a été une véritable révélation !

Sa longévité lui a permis de laisser un souvenir mémorable dans sa région.

La calanque est le plus bel héritage qu'elle pouvait laisser à la postérité.

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