Les légendes et le folklore luxembourgeois
- Ginette Flora Amouma

- 3 juin
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 23 juin

© La statue de la Vierge, la tour de guet, le donjon carré, les ruines du château et la chapelle
Photo personnelle
Un personnage est particulièrement récurrent dans le monde du petit peuple des contes du Luxembourg.
C’est le nain, issu des légendes germanophobes. Il est suivi de son compère le lutin des contes de fées des pays frontaliers, les Ardennes, la Belgique et l’Allemagne. Le Luxembourg est un pays boisé en majorité couvert de forêts, de bois et le plus haut massif ne culmine qu’à 560 m d’altitude. Le Nord et le Sud du Luxembourg affichent une nette différence de relief et de tableaux paysagers. Le Nord est couvert de collines. C’est l’Oesling qui prolonge le massif des Ardennes.
Le Sud, appelé familièrement « le bon pays » est une région qui ne dépasse pas plus de 200 m de hauteur. C’est le Gutland avec sa vallée de châteaux, ses terres rouges, son plateau et la vallée de la Moselle. Une petite terre, la Mullerthal située à l'Est du Luxembourg, est même appelée la petite Suisse du Luxembourg car elle offre des paysages empreints de merveilleux, vallées troublantes de feuillus, de ponts suspendus, de cascades féeriques qui laissent une vision impérissable.
La Moselle a des affluents comme la Sûre, l’Alzette et le long de leurs berges, on trouve la plupart des châteaux médiévaux qui ont contribué à peupler le bon pays de personnages légendaires issus de l’histoire des familles régnantes et de la culture luxembourgeoise. Ignorer le nain de Nibelung voire passer à côté des lutins, est un crime de lèse-majesté !
Ils habitent dans les forêts de hêtres et de frênes, d’érables et de tilleuls, de bouleaux et de trembles. Le merisier, le charme et l’orme portent sur leurs troncs des messages sibyllins gravés à la griffe de la femme sauvage dont on raconte l’histoire dans les veillées.
Le répertoire des personnages fabuleux, des créatures mythiques est très fourni. Enclavé par des pays frontaliers, le Luxembourg est au centre d’une culture germanophobe très ancrée dans les mentalités. Si les légendes sont tombées dans l’oubli, quelque événement troublant vient rappeler que les nains et les lutins n’abandonnent jamais leur croisade dans les esprits des vivants. Une forte imagination féerique surnage dans la vie des luxembourgeois. Ce petit pays entouré de forêts, couvert d’un domaine végétal dense et prospère est un endroit aussi évocateur que celui de Brocéliande.
En France, nous avons Brocéliande. Au Luxembourg, il y a la dame blanche.
La dame blanche
C’est la figure phare du Luxembourg, cette légende se décline en plusieurs versions.
Au Nord, à Esch sur Sûre, c’est une légende romantique d’une jeune femme cachée dans la forêt qui serait l’esprit d’une jeune femme assassinée. Elle errerait dans les bois à la recherche de son amour perdu. Elle pleure parfois des larmes de lune. Et c’est en Mai qu’elle vient rôder près de la chapelle.
Etaient-ce ses cris de douleur que nous avons entendus lors de notre séjour du 13 au 16 Mai ?
Au Sud, on raconte l’histoire de la femme sauvage qui s’est retirée dans les grottes de la vallée et qui réapparaît vêtue de blanc et tenant une clé que nul ne peut s’emparer car la dame se transforme aussitôt en dragon cracheur de feu. S’étant vue refuser l’entrée en enfer car même les dieux de l’enfer la redoutaient, elle fut obligée de remonter sur terre et de hanter la région sous forme de spectre effrayant. Un ermite de la forêt de Sélomon réussit à chasser son esprit maléfique au-delà des montagnes en priant à Notre Dame du Luxembourg.

Ailleurs, on raconte qu’une comtesse aurait caché son trésor dans les souterrains de son château, un trésor de bijoux et d’or que le petit peuple cherche encore la nuit, dit-on, les nains et les esprits nocturnes fouillent les bois, une lanterne à la main faisant courir des faisceaux de lueurs entre les arbres.
On dit aussi qu’un gardien vient souvent visiter le château et veiller sur les éventuels égarés de la nuit. Il se manifeste sous la forme d’une ombre rassurante.
Ces légendes déclinées sur le mode traditionnel et oral prennent leur source aux temps où les habitants se calfeutraient pour supporter les hivers longs et enneigés. Dans des villages isolés, les gens se rencontraient et trouvaient du réconfort à se rassasier d’une lichette de merveilleux et d’une rasade de fabuleux, la nature aux plantes émeraude étant leur principal objet d’émerveillement.
Au XIXème siècle, l’émergence des nations s’appuie sur les particularités d’une région pour asseoir ses fondements culturels, langue, religion, histoire, contes et légendes, tout devient racine d’authenticité pour leur terre nourricière. On peut comprendre que leur livre de contes et de légendes est un outil précieux.
Les nains et les lutins
Ces petits êtres font partie de la population du Luxembourg. Les montagnes sont leur habitat, ils ont leurs maisonnettes, leurs cachettes et savent circuler entre les arbres et les futaies. Ce sont des trouble-fêtes pense-t-on mais s’ils sont facétieux, toujours enclins à faire des tours à leur façon, un pavé descellé, une pierre branlante, ils n’ont pas leurs pareils pour glousser de rire ou chatouiller le dos pendant qu’on mange une tarte aux pommes.
Une toquade hilarante, c’est leur spécialité quand ils se glissent, ces petits êtres, entre les longs verres de bière mousseuse et les flûtes de liqueurs du pays. S’ils s’aperçoivent qu’on les aime bien, ils laissent des cadeaux, un dessin sur une serviette de table, une apparition dans le déroulé d’un menu, on ne compte plus leurs intrusions quand on prend le pli de les apprivoiser.
Les créatures terrestres sont nombreuses au Luxembourg particulièrement dans les forêts et les champs, les grottes et les ruines. Le petit pays ayant des frontières avec l’Allemagne, reçoit la visite des créatures germanophobes comme l’imaginaire des légendes allemandes, de la Lorraine, de la Suisse. Le nain et le lutin sont les figures majeures de l’univers elfique du Luxembourg.
On peut parler du lutin Biersal qui vit dans les caves et les brasseries et participent aux travaux domestiques en échange d’une bonne bière luxembourgeoise.
Les esprits forestiers les Bushweiber sont les plus présents comme les kobolds, les esprits des montagnes.
Elberich du peuple des Niebelungen, les fils du brouillard, que Wagner évoque dans le cycle du Ring est un invité prestigieux comme Erdenmendl, le nain qui ne supporte pas le rouge mais qui voit le bleu d’un bon œil !
Puis viennent les gnomes, artistes ou malfaisants ? Le gnome est avant tout une créature légendaire, une figure emblématique du folklore des pays germanophobes. Il vit sous terre, veille sur les trésors cachés dans les anfractuosités, connaît le monde souterrain et ses véritables richesses. Il est considéré comme un génie de la terre qui garde les trésors de la montagne.
Il est lié à l’étude des cristaux et des pierres précieuses, c’est celui qui connaît l’or de la terre. Comme l’écrit C.S.Lewis dans Le monde de Narnia, les gnomes sont des artistes, les habitants du monde souterrain.
Verlaine écrit dans Charleroi poème de 1872, dans Romances sans paroles.
Dans l’herbe noire
Les kobolds vont
Le vent profond
Pleure, on veut croire
Quoi donc se sent ?
L’avoine siffle.
Un buisson gifle
L’œil au passant.
Verlaine - 1872
Esch sur Sûre
C’est un petit village enchâssé dans les montagnes et qui se trouve au pied du plus vieux château féodal du Luxembourg. Esch sur Sûre est une vieille cité médiévale bâtie autour des berges où coule la Sûre. En empruntant des ruelles étroites, on monte un chemin qui conduit jusqu’aux ruines du château et de son donjon carré. La tour de guet a été construite au XVème siècle. La chapelle du château fait face aux vestiges de la région.
On voit également la statue de la Vierge Marie qui est la patronne d’Esch sur Sûre. C’est une copie de la Vierge couronnée érigée sur l’esplanade de la basilique de Lourdes.
Selon la légende, une femme du village atteinte d’un cancer s’était rendue en pèlerinage à Lourdes et aurait vécu le miracle d’une guérison inattendue. En guise de remerciement, elle aurait proposé au curé Dominik Trausch d’ériger une statue de la Sainte Vierge. Les habitants auraient participé à la collecte qui avait permis de réaliser le projet qui voit le jour en 1910 d’où l’inscription :
« Les habitants d’Esch sur Sûre l’ont établie pour leur protectrice »
Un maître d’ouvrage Albert Lutzeler et un sculpteur Wilhelm Perters ont façonné cette œuvre mesurant 3,10 m de hauteur. Sa couronne est éclairée.
Les guerres mondiales ont fait des dégâts. La statue a été restaurée et lors de la fête de l’Assomption, elle est honorée au cours d’une procession aux lampions, suivie par de nombreux fidèles.

© Photo personnelle - 2025
Victor Hugo en son temps a visité le château alors occupé par les derniers résidents. Un musée littéraire retrace le passage de Victor Hugo au Luxembourg dans le village de Vianden. Outre ses visites épisodiques, il a vécu trois mois comme refugié politique lors des événements insurrectionnels de la Commune à Paris en 1870 -1871.
Le village est aussi célèbre pour ses draperies. Un musée de la draperie évoque les temps où le village s’est spécialisé dans le tissage de la laine. Le musée retrace l’épopée du travail de la laine en ces années où la fabrication artisanale du tissu occupait les habitants.
En 2006, après restauration, le château devient un monument national.
L’hôtel de la Sûre et son restaurant, situé dans le parc naturel de la Haute Sûre, nous ont accueillis pour un moment de détente et de convivialité. Les nains du jardin étaient au rendez-vous !
Ginette Flora

Mai 2025




Chère Ginette, voilà un post sur le Luxembourg qui accompagnerait à merveille, les informations dispensées par l'Office du Tourisme ! ^^ Je suis toujours ravi de partir en balade en ta compagnie car ces dernières sont chaque fois très enrichissantes ! ^^