La page du mélomane XXI - Chant pour Slava
- Ginette Flora Amouma

- 3 oct.
- 4 min de lecture


© art.com - Rostropovitch, aquarelle d'Alexandre Touranski, peintre ukrainien -2007
Slava, c'est un diminutif que les amis de Mstislav Rostropovitch ont adopté, un diminutif que Louis Aragon place en guise de titre au poème qu'il écrit en hommage à son ami, le violoncelliste.
« Songer aux brumes de Russie
Où j’ai tant souffert, tant aimé
Qu’est resté mon coeur inhumé » (Pouchkine)
Ô soleil du chant dans la nuit
Rien d’abord qu’une
Voix de couteau aiguisé au tranchet de lune
Puis cela s’éveille s’avance s’aventure
Cela vient de partout comme un vent divisé
Le bel hiver arrive et les arbres sont nus
Mais les oiseaux mais les oiseaux depuis quand les oiseaux bercent-il ainsi le profond décembre
[…]
Ô diable de la musique
Fils du courage et de la folie
Salut à toi Slava par qui grâce à qui tout peut-être tout ne m’est pas tout à fait ôté
Toute beauté
Les adieux -Aragon-1982
Rostropovitch est né en 1927 à Bakou en Azerbaïdjan et il est mort en avril 2007 à Moscou. Sa vie est un voyage entre sa terre natale et ses exils. Il est pianiste et compositeur, professeur de musique et il tâte même de l’archet en tant que chef d’orchestre. Il sait aussi saisir le moment qui lui est donné de diriger un opéra !
Il se fait connaître en interprétant le répertoire classique de J.S. Bach, de Dvorak en passant par Prokofiev, Chostakovitch, Debussy, Schumann. Il donne à son violoncelle un espace mémorable. Ce géant qu’est cet instrument, se dit Rostropovitch, n’a pas un répertoire assez abouti. Rostropovitch estime que le violoncelle peut rendre des sons plus somptueux, il se sent capable de lui faire exécuter des pièces variées. Il s’emploie à interpréter plus d’une centaine d’œuvres des compositeurs classiques. C’est le plus grand violoncelliste du XXème siècle.
S’il brillait par son aisance à apprendre rapidement des partitions et de les jouer avec virtuosité, il déploya une énergie inépuisable à multiplier des projets caritatifs, à s’engager pour des causes humanitaires, à siéger dans les académies d’arts pour promouvoir la musique, à créer des écoles et des fondations en vue d’aider les opprimés.
Ses actions humaines sont considérables, toutes dictées par son amour de la musique.
La Russie
C’est auprès de sa mère qu’il apprend le piano et découvre le violoncelle auprès de son père qui lui-même est fils de violoncelliste.
Il est très jeune, à peine 13 ans, quand il se produit dans des concerts et se fait remarquer en jouant « Le concerto pour violoncelle n°1 de Saint-Saens ». Sa carrière est toute tracée, de concert en concert, il apparaît jouant essentiellement comme soliste. Après des études de musique, il choisit le violoncelle, il obtient plusieurs prix à des concours nationaux et internationaux. Quand il se met à enseigner au Conservatoire de St Petersburg puis à Moscou, il est déjà très connu dans son pays.
A partir de 1963, il s’ouvre à l’Europe et se produit sur la scène internationale en Belgique et en Allemagne. C’est lors de ses voyages qu’il rencontre d’autres compositeurs et musiciens comme Benjamin Britten qui compose pour lui. Dès lors, des compositeurs lui demandent d’interpréter leurs morceaux. Il accepte de jouer les symphonies de Chostakovitch, de Prokofiev, de Dvorak. Passionné d’opéra, il accepte de diriger la pièce Eugène Oneguine de Piotr Ilitch Tchaïkovski au Théâtre du Bolchoï à Moscou.
Il aura vécu en Russie, de sa naissance en 1927 jusqu’à cette date fatidique de 1974 où commence son exil. C’est en soutenant des personnalités opposées au régime totalitaire de la Russie qu’il voit sa carrière de concertiste stoppée. Son engagement dans les affaires politiques et humanistes lui vaut de sérieux ennuis. Il est mal vu des dirigeants du régime en présence d’autant que Rostropovitch défend et soutient son ami Soljenitsyne considéré comme un dissident. Il parvient à sortir de la Russie et à s’établir aux Etats-Unis.
Une autre vie commence pour lui.
Les Etats-Unis
Son exil dure de 1974 à 1990. Il perd sa nationalité russe et c’est seulement en 1982 qu’il obtient la nationalité suisse puis est réhabilité en 1990. Pendant cet intervalle, il se dit apatride.
Il dirige l’orchestre national de Washington, s’engage dans de nombreux projets, organise des récitals, des concerts et joue avec les compositeurs comme Horowitz, Richter et d’autres figures prestigieuses qu’il rencontre et apprécie.
En 1989, sa prestation devant la chute du mur de Berlin lui assure une large audience médiatique, l’événement étant relayé par toutes les ondes radiophoniques et télévisées de l’homme assis seul sur une chaise et interprétant « Les suites pour violoncelle seul de J.S.Bach »
En 1990, le nouveau régime russe le réhabilite. Rostropovitch peut s’engager dans la vie officielle de son pays et recevoir prix et honneurs tout en étant libre de circuler de par le monde et de faire entendre la voix de son violoncelle.
C’est une période très riche où il développe une intense activité internationale, acceptant les charges que lui décernent l’Unesco, les universités, les fondations. Il s’attache à créer des écoles, des fonds publics, des manifestations pour l’accès à la musique chez les plus défavorisés comme chez ceux qui ignorent ce qu’est le monde musical.
2007 : la fin d’un maître
Il est à Paris et sa santé décline. Se sachant parvenu au bout de sa route, il demande à ce que l’on le ramène à Moscou où il meurt. Il a été enterré au cimetière sis dans les faubourgs de Moscou.
Rostropovitch interprète l'andante cantabile de Tchaïkovski.
Documents consultés :
© Wikipédia
Archives de l'INA
Radio France
Ginette Flora
Octobre 2025




Oh trop beau ... et Aragon, un moment de délice ... merci à toi ❤️
Un compositeur ballotté par les guerres
Son violoncelle lui a servi de guide tout au long de sa vie !
Je découvre l'adieu d'Aragon.
Merci Ginette