top of page

La page de Marcel Faure - Poésies Octobre 2025


ree

La terre au corps

 

Paroles au goût de terre

La ferme toujours vivante

Dans les mots de mon père

 

Les bœufs et les chars

Le foin dans la grange

Le saucisson du casse-croûte

 

Les yeux s’inquiètent du ciel

Pour surveiller le temps

Des fois qu’il nous ferait misères

 

Son regard s’égare

Les mots se font plus lourds

Mon père s’est endormi

 

**

Pelouse d’une phrase

Quelques mots ordinaires

 

Quelques jours plus tard

Pousse de fioritures

 

Il faut gommer régulièrement

Pour préserver le quotidien

 

**

Stéphanois

 

Réseau urbain

Bus et tram

Qui se croisent se chevauchent

Jusqu’au centre

 

Au centre il n’y a plus rien

Commerces aveugles

Dans les rues adjacentes

À la mairie et à la préfecture

 

À l’entour des places

Les cafés débordent

Les banques se barricadent

La ville grouille de dangers

Et les jours de manif

Tout est à l’envers

Mais les gens

Même les plus patibulaires

Ont cette parole facile

Qui frise la confidence

Qui éteint la méfiance

 

Les urbanistes

N’urbanisent plus rien

Par slogans interposés

Des murs bavardent

Des affiches se crachent dessus

Pourtant on se contente de crier un peu fort

De chaparder quelques sacs

De narguer le bourgeois

Comme nous le faisions adolescents

Mais l’âge oublie sa jeunesse

Nous sommes des aigris et des vieux cons

Grognons bougonnant râlant

Juste le temps de chasser la mouche du côche

Et la bonhomie revient en courant

Nous sommes comme ça les stéphanois

Toujours à la recherche de la convivialité

 

**

 

Sur le quai

 

La gare n’en finit pas de raconter des destinations

Le voyage pourrait s’arrêter là

À lire des terminus

 

Il aurait pris son billet pour accéder aux quais

Il ferait un signe avec son mouchoir dans

L’effervescence des bousculades

 

Il prendrait pour lui

Un baiser que l’on jette du bout des doigts

Ce serait là son premier amour qui s’en va

 

Mais si souvent quitté

Il est là pour accrocher l’espoir

De porter ta valise en hélant un taxi

 

Tu reviendrais d’une ville lointaine

En provenance de Zix le train va arriver

Éloignez-vous du quai

 

Pour t’ouvrir les bras

Il ôterait sa peau de survie

Toutes les villes alors se livreraient à lui

 

** 

Pardon

 

À la surface de la mer

Les traces effacées

Des grands navigateurs

 

Le silence des siècles

Le brouhaha de l’Histoire

Seuls quelques noms émergent

 

Combien de matelots anonymes

Ont nourri les requins

Armateurs ou marins

 

Et vous du fond des calles

J’entends vos cris

J’entends vos pleurs

 

Parfois la mer prenait pitié

Avalait un navire

Abrégeant vos douleurs

 

Le vent n’en finit pas

De caresser les îles

D’où partaient les bateaux

 

J’étais de ceux qui

Bien tranquilles

Souffraient d’autres maux

 

Pardon pardon pourtant

Pour tous ces imbéciles

Qui veulent oublier

 

**

Toi déjà

 

À la recherche des origines

Tu étais près de moi

Et je l’ignorais

Tu habitais l’été

La maison d’à côté

J’imagine ta sœur

Un œil sur toi

Petite furie en jupette

Ton visage pâquerette

Et moi chez l’oncle

Au cul des vaches

Au soir la soupe grasse

L’œil du lard me narguait

 

L’après-midi la sieste

Sous le grand tilleul

Près du bachat

Nous aurions pu dormir ensemble

Déjà

Mais ta mère volets clos

Veillait sur ton repos

 

Nos univers parallèles

Pas encore alignés

Sur les mêmes planètes

Patientaient paisiblement

Dans l’enfance sereine

Sis sept ans peut-être

Déjà nous nous frôlions

Dans le parfum des prés

 

**

Marche à pieds fourbus

Les kilomètres s’additionnent

Les jambes s’alourdissent

 

C’est un chemin à hauteur d’homme

Là-haut des traits de brume

Paris-Sidney sans y penser

 

Ici un pas s’appelle un pas

Suivre la Loire jusqu’à Nantes

Par le chemin des bateliers

 

L’eau murmure des complaintes

Quand des écluses passent des seuils

Sur le canal latéral

 

D’un regard se rêver châtelain

Chaumont Chambord ou Chenonceau

L’étape sera plus modeste

 

Certains me prennent pour un fou

Les mots des berges me rassurent

Je suis un pèlerin d’aventure

 

Petites auberges vieux clochers

Vous savez le prix des souliers

Et la valeur des mains tendues

 

Matins soleils matins de pluie

Chaque jour son lot de surprises

Et Nantes qui pointe son nez

 

**


Mes arbres familiers

Me parlent de voyages

Faire le tour du bois

Serait un bon début

Nés ici ils voudraient

Remonter vers le nord

Là où il fait plus frais

 

Mes arbres familiers

Savent le temps qui change

Grimper sur la colline

Serait un bon début

Ils pourraient en vigie

Surveiller les fumées

Prévenir l’incendie

Mes arbres familiers

Ne veulent pas mourir

 

Mes arbres familiers

Me réclament à boire

Je n’ai qu’un arrosoir

Quelques gouttes à chacun

Quel apport dérisoire

C’est peu mais c’est ma part

 

**

Maison lestée d’amour

Qui berce ses habitants

Sous un orage lourd

 

Tuiles et charpente

Le vent se sait vaincu

Mais se démène encore

 

Et l’eau drue sur le toit

La belle douche que voila

Et le soleil me sèchera

 

Elle parle un drôle de langage

De petits bruits dans l’escalier

Une porte qui grince de joie

 

Et quand l’aube se réveille

Par la fenêtre qu’on ouvre

Elle sourit aux fleurs du jardin

 

**


Obstinément

 

Glissement des bleus

La mer et le ciel

Sources de la lumière

 

L’ile parmi les eaux

Propage la rumeur

De ses vertes vallées

 

Essaim des feuilles

Il suffit d’un premier arbre

Pour respirer

 

Sur l’épaule de l’air

Un enfant s’appuie

Confiant en l’avenir

 

Sur la margelle des plages

Les soleils dansent

Avec l’espoir des hommes

 

Tout est possible

Et je souris encore

Aux vents des jours meilleurs

ree

 

Poésies Marcel Faure

Novembre 2025


2 commentaires


Élisabeth
10 nov.

Merci Marcel pour ces mots parfois doux, parfois sombres mais qui nous touche toujours

Vivement décembre pour de nouvelles découvertes !

J'aime

viviane parseghian
08 nov.

Toujours magnifique de voyager avec Marcel, de voguer d 'émotion en émotion ... merci .... c'est beau ... tellement !♥️

J'aime
bottom of page