La page de Marcel Faure - Poésies Octobre 2025
- Ginette Flora Amouma

- 8 nov.
- 4 min de lecture

La terre au corps
Paroles au goût de terre
La ferme toujours vivante
Dans les mots de mon père
Les bœufs et les chars
Le foin dans la grange
Le saucisson du casse-croûte
Les yeux s’inquiètent du ciel
Pour surveiller le temps
Des fois qu’il nous ferait misères
Son regard s’égare
Les mots se font plus lourds
Mon père s’est endormi
**
Pelouse d’une phrase
Quelques mots ordinaires
Quelques jours plus tard
Pousse de fioritures
Il faut gommer régulièrement
Pour préserver le quotidien
**
Stéphanois
Réseau urbain
Bus et tram
Qui se croisent se chevauchent
Jusqu’au centre
Au centre il n’y a plus rien
Commerces aveugles
Dans les rues adjacentes
À la mairie et à la préfecture
À l’entour des places
Les cafés débordent
Les banques se barricadent
La ville grouille de dangers
Et les jours de manif
Tout est à l’envers
Mais les gens
Même les plus patibulaires
Ont cette parole facile
Qui frise la confidence
Qui éteint la méfiance
Les urbanistes
N’urbanisent plus rien
Par slogans interposés
Des murs bavardent
Des affiches se crachent dessus
Pourtant on se contente de crier un peu fort
De chaparder quelques sacs
De narguer le bourgeois
Comme nous le faisions adolescents
Mais l’âge oublie sa jeunesse
Nous sommes des aigris et des vieux cons
Grognons bougonnant râlant
Juste le temps de chasser la mouche du côche
Et la bonhomie revient en courant
Nous sommes comme ça les stéphanois
Toujours à la recherche de la convivialité
**
Sur le quai
La gare n’en finit pas de raconter des destinations
Le voyage pourrait s’arrêter là
À lire des terminus
Il aurait pris son billet pour accéder aux quais
Il ferait un signe avec son mouchoir dans
L’effervescence des bousculades
Il prendrait pour lui
Un baiser que l’on jette du bout des doigts
Ce serait là son premier amour qui s’en va
Mais si souvent quitté
Il est là pour accrocher l’espoir
De porter ta valise en hélant un taxi
Tu reviendrais d’une ville lointaine
En provenance de Zix le train va arriver
Éloignez-vous du quai
Pour t’ouvrir les bras
Il ôterait sa peau de survie
Toutes les villes alors se livreraient à lui
**
Pardon
À la surface de la mer
Les traces effacées
Des grands navigateurs
Le silence des siècles
Le brouhaha de l’Histoire
Seuls quelques noms émergent
Combien de matelots anonymes
Ont nourri les requins
Armateurs ou marins
Et vous du fond des calles
J’entends vos cris
J’entends vos pleurs
Parfois la mer prenait pitié
Avalait un navire
Abrégeant vos douleurs
Le vent n’en finit pas
De caresser les îles
D’où partaient les bateaux
J’étais de ceux qui
Bien tranquilles
Souffraient d’autres maux
Pardon pardon pourtant
Pour tous ces imbéciles
Qui veulent oublier
**
Toi déjà
À la recherche des origines
Tu étais près de moi
Et je l’ignorais
Tu habitais l’été
La maison d’à côté
J’imagine ta sœur
Un œil sur toi
Petite furie en jupette
Ton visage pâquerette
Et moi chez l’oncle
Au cul des vaches
Au soir la soupe grasse
L’œil du lard me narguait
L’après-midi la sieste
Sous le grand tilleul
Près du bachat
Nous aurions pu dormir ensemble
Déjà
Mais ta mère volets clos
Veillait sur ton repos
Nos univers parallèles
Pas encore alignés
Sur les mêmes planètes
Patientaient paisiblement
Dans l’enfance sereine
Sis sept ans peut-être
Déjà nous nous frôlions
Dans le parfum des prés
**
Marche à pieds fourbus
Les kilomètres s’additionnent
Les jambes s’alourdissent
C’est un chemin à hauteur d’homme
Là-haut des traits de brume
Paris-Sidney sans y penser
Ici un pas s’appelle un pas
Suivre la Loire jusqu’à Nantes
Par le chemin des bateliers
L’eau murmure des complaintes
Quand des écluses passent des seuils
Sur le canal latéral
D’un regard se rêver châtelain
Chaumont Chambord ou Chenonceau
L’étape sera plus modeste
Certains me prennent pour un fou
Les mots des berges me rassurent
Je suis un pèlerin d’aventure
Petites auberges vieux clochers
Vous savez le prix des souliers
Et la valeur des mains tendues
Matins soleils matins de pluie
Chaque jour son lot de surprises
Et Nantes qui pointe son nez
**
Mes arbres familiers
Me parlent de voyages
Faire le tour du bois
Serait un bon début
Nés ici ils voudraient
Remonter vers le nord
Là où il fait plus frais
Mes arbres familiers
Savent le temps qui change
Grimper sur la colline
Serait un bon début
Ils pourraient en vigie
Surveiller les fumées
Prévenir l’incendie
Mes arbres familiers
Ne veulent pas mourir
Mes arbres familiers
Me réclament à boire
Je n’ai qu’un arrosoir
Quelques gouttes à chacun
Quel apport dérisoire
C’est peu mais c’est ma part
**
Maison lestée d’amour
Qui berce ses habitants
Sous un orage lourd
Tuiles et charpente
Le vent se sait vaincu
Mais se démène encore
Et l’eau drue sur le toit
La belle douche que voila
Et le soleil me sèchera
Elle parle un drôle de langage
De petits bruits dans l’escalier
Une porte qui grince de joie
Et quand l’aube se réveille
Par la fenêtre qu’on ouvre
Elle sourit aux fleurs du jardin
**
Obstinément
Glissement des bleus
La mer et le ciel
Sources de la lumière
L’ile parmi les eaux
Propage la rumeur
De ses vertes vallées
Essaim des feuilles
Il suffit d’un premier arbre
Pour respirer
Sur l’épaule de l’air
Un enfant s’appuie
Confiant en l’avenir
Sur la margelle des plages
Les soleils dansent
Avec l’espoir des hommes
Tout est possible
Et je souris encore
Aux vents des jours meilleurs

Poésies Marcel Faure
Novembre 2025




Merci Marcel pour ces mots parfois doux, parfois sombres mais qui nous touche toujours
Vivement décembre pour de nouvelles découvertes !
Toujours magnifique de voyager avec Marcel, de voguer d 'émotion en émotion ... merci .... c'est beau ... tellement !♥️