La page de Marcel Faure- Poésies Novembre 2024
- Ginette Flora Amouma

- 9 déc. 2024
- 4 min de lecture

Onagre
Fleur ouvrant son cœur
À heure fixe
Enfin à l'heure du couchant
Qui change chacun sait
Avec l'été déclinant
Cette frénésie jaune
Cherche un amant
Un insecte baraqué ferait l'affaire
Et de l'ombre naissante jaillit l'amoureux
Pour combler de sa trompe
La belle onagre
**
Le vent par la fenêtre ouverte
Bizarrement s'engouffre dans ma tête
Et c'est la mer là-bas qui me berce
La rumeur des quais et les bateaux qui tanguent
Je m'en vais
Suis-je assez loin pour t'oublier
Les îles se ressemblent
Et les nuages filent
Tournent autour de la terre
Et te cherchent
En vain
Au long des quais des cheveux flottent
Sous l'œil des marins en partance
Sérieux comme des clowns tristes
Pour crier ton nom j'ai pris un porte-voix
Le grand large absorbe ton souvenir
Je ferme la fenêtre
Je somnole
**
La fenêtre qui s'ouvre
Et le vent se balance
Au rideau de la chambre
**
La source qui chante
Qui chante dans la cour
Rafraichit la maison
Au cœur de l'été
C'est un éclat de rire
Résonnant sur les pierres
L'arbre se dandine
Sous la brise légère
Les oiseaux chantent aussi
Et dans le ciel si clair
Le matin frise l'air
D'un zeste de rosée
**

Ah vivre d'un seul jet
Un oiseau mécanique
Musique les heures
Aux caresses trompeuses
Un livre pages blanches
Attend des plumes
Pour agrandir le monde
Et l'horizon qui tourne
Sur l'axe des saisons
Aveugle les voyants
Desnos paupières clauses
Choisit quelques mots
Dans les éclats de voix
L'univers surréel
Dispute un nouveau jeu
Pour casser l'habitude
En grand charivari
Conspuer le bourgeois
Spectacle dans le spectacle
Ah vivre d'un seul jet
Dans un monde nouveau
Naître d'un seul poème
**
Villégiature
La ville-décors tente de rafraîchir
Par de maigres arbustes
La fournaise du jour
Il fait un temps à ne pas mettre un touriste dehors
Graissée à l'ambre solaire
La plage somnole
Dans un ciel d'or fané
Le soleil mourant
Tarde à s'effacer
Odeurs de poissons et de mazout
La mer prête à bouillir
Fricasse une drôle de soupe
Le ciel ensanglanté
Condescend à noircir
Mais qui pourra dormir
Dans l'étuve des chambres
**

Au milieu des terres
Ile liquide
Un bras oublié
Déploie son coude
Eau libellule
Menu fretin
Un oiseau rit
D'un facile festin
Tout près
Ça craque
Un arbre casse du bois
Loin des crues
L'eau n'est que pluie
Qu'un rien évapore
Au loin le fleuve
Se forge un nouveau lit
**
Berges alanguies
Deux branches sous le vent
Baignent leurs feuilles
D'un trop plein de soleil
Un couple immobile
Rivalise d'amour
Mots doux dans le courant
Un petit pont reçoit
Des messages éternels
Qu'il jalouse en silence
Immobiles aussi
Sur la piste des fleurs
Des insectes badinent
Un nuage qui baille
Déploie son ombre douce
Sur le miroir de l'eau
**
Salle des pas perdus
Amours croisés
Sitôt envolés
Quai des grands départs
Une voix inconnue
Annonce mon désastre
Aigrette d'un chapeau
Est-ce toi là-bas
Aux bras d'un quidam
Pagayant dans la foule
Pataud avec mes rêves
Je ne sais où aller
**
Ainsi le fleuve
Pont des amours
Pont des suicidés
Pont du diable
Pont des soupirs
Presque pataud
Avec nos sentiments
Nous engage à la mer
Une barque portée par le courant
Passe sous une arche
Discrètement
Suivre le fil de l'eau
**

Une barque clapote
L'eau roucoule sa chanson de mer
Roulez galets
La route est encore longue
Marchant sur le halage
Le randonneur compte en semaines
Traces stridentes
Un oiseau file
Grand ouest
**
Entre verts et bleus
Les courants chavirent
Et puis le soleil
Fleuve d'or
Bancs de sable
Mirages d'îles
L'eau s'égare
Labyrinthe des bras
Berges provisoires
Herbes nonchalantes
Une mouette trompeuse
Crie à la mer
Chaleur pesante
Le fleuve alangui
Transpire un brin de brume
Espère l'orage
Grondements
Ce n'est qu'un train
Que la moiteur étouffe
**
Boîtes à livres
Dans les boîtes à livres
Glaner quelques ouvrages
Et découvrir le choix des autres
Mis au rebus
Pour toi qui as lu
Ces pages avant moi
Quelques mots récupérés
Au gré de mes humeurs
Ils ne sont plus tout neufs
Mais le vent dans ma tête
Est toujours frais
Grand large des pages
J'ai hissé les voiles
Partons
**
Pour habiter le monde
Écrire le minuscule
Qui comble les vides
Pour créer l'équilibre
Poser le grain de sable
Du bon coté de la balance
Entre les bras du jour
Déposer un sourire
Pour conforter l'amour
Des mots peut-être
Mais dire ce que l'on est
Contre les vents contraires
Ailes de papillon
Légende colibri
N'être qu'un grain de sable
Mais pleinement
Sans plus tergiverser
Agir pour s'estimer
Marcel Faure
"Portes" -Anthologie- Lisière Editions - Nov 2024





La plume de Marcel est un bonheur de poésie ...à résonner au coeur longtemps !❤️