La maison et le monde, un film de Satyajit Ray
- Ginette Flora Amouma

- 21 janv.
- 3 min de lecture

Le film de Satyajit Ray, sorti en 1984, sort à nouveau en version restaurée le 29 janvier 2025.
Le cinéaste a adapté le roman « La maison et le monde » de l’auteur bengali Rabindranath Tagore. Satyajit Ray est un cinéaste du monde indien pris entre deux postures, l’ancien et le nouveau, thématique développée par Tagore dans ses romans que Satyajit Ray porte à l’écran.
« Trois filles, 1961 » , « Charulata 1963 », « La maison et le monde, 1984 »
Tagore est le lumignon qui éclaire la culture bengalie et le cinéaste n’omet pas d’en faire ressentir les fragrances dans tout le film.
La maison et le monde

Au début du XXème siècle, dans la région du Bengale, deux amis sont entraînés dans les tourments des événements qui agitent le devant de la politique indienne qui lutte contre le colonialisme britannique pour s’assurer une indépendance nationale.
Nikhil est un zamindar, un propriétaire terrien soucieux de préserver l’avenir de ses terres.
Sandip est un orateur politique haranguant les foules pour les inciter à œuvrer vers l’adhésion à l’indépendance du pays resté longtemps sous la domination britannique.
Une femme, Bimala, la femme de Nikhil vient troubler leurs idéaux. Une femme qui sort de la réclusion traditionnelle et découvre la complexité du monde.
Car les discours enflammés de Sandip, son art de la persuasion, son charisme font trembler les fondations de l’âme de Bimala habituée à la modération de son entourage et à la tranquillité des sentiments acquis.
Sandip osera-t-il capturer le désir de Bimala, c’est aussi le thème du film, sous-jacent, brûlant car le drame est aussi un huis clos entre un trio qui sait que des braises rougeoient dans la maison. Dès le début du film, la tragédie est posée, il n’y aura pas d’issue. Le feu est rouge sur « La maison et le monde ». La partition religieuse se fera, le colonisateur étranger partira, le trio éclatera.
Nlkhil s’évertue à vouloir une entente pacifique entre les diverses confessions. Nikhil est clairvoyant quand il voit Bimala réagir à l’énergie saillante de Sandip et à ses méthodes expéditives.
Sandip sait que Bimala est sur le point de flancher, Nikhil sait qu’il perd Bimala et la femme, elle, clairvoyante se voit surprise par un sentiment qu’elle ne connaît pas : le trouble amoureux.
Elle sait que Sandip lui inocule une sorte d’euphorie qu’elle n’a pas connue.
Le huis clos crépite, des boules de feu se globulent, ne tarderont pas à flamber.
Tous s’observent. Le cinéaste excelle à traduire les jeux de scènes intérieurs, un postulat récurrent dans ses films où le dilemme des personnages est filmé avec art et précision.
Sur fond d’enjeux politiques et de différences sociales, un jeu amoureux se met en place alors que chacun sait déjà que tout le monde sortira perdant.
Le film est tout entier de couleur rouge et orange, les couleurs qui détruisent pour pouvoir purifier, éclairer et reconstruire. Le rouge de la colère, le rouge sang de la révolte, le feu qui couve au plus profond de l’être humain, les flammes de la passion aveugle, la brûlure d’un mal incandescent, le film se couvre de symboles et d’aveux suggérés qui le classent parmi les films d’auteur. Satyajit Ray propose une nouvelle version de son regard sur le nouveau monde.

C’est une fresque grandiose, « un péplum à l’ancienne », disent certains critiques.
Satyajit Ray et Rabindranath Tagore sont liés par une sorte de contrat social quand l’un filme les soubresauts d’une époque qui change et que l’autre fait de sa littérature un fanal de la culture bengalie. Cinéma, romans, poésies, musique, peinture, à eux deux, ils forment le noyau du genre humain.
Ginette Flora
Janvier 2025




Je me souviens de cette époque quand nous allions découvrir les films de Satyajit Ray... Quel serait maintenant mon regard sur ces derniers ? Pourquoi pas tenter l'aventure...
"Cinéma, romans, poésies, musique, peinture, à eux deux, ils forment le noyau du genre humain. ' On a juste envie de regarder et de découvrir cet univers que tu nous contes si bien ...❤️