Des hommes et des dieux
- Ginette Flora Amouma

- 24 déc. 2024
- 4 min de lecture
Le film « Des hommes et des dieux » de Xavier Beauvois est sorti en septembre 2010.
Paroles des chants : Didier Rimaud
Plusieurs compositeurs : Jo Akepsimas ; Marcel Godard
La musique est particulièrement choisie pour accompagner les liturgies d’une part, les instants critiques d’autre part. La scène finale avec les dernières mesures du Lac des cygnes comme un écho au dernier repas du Christ avant sa crucifixion et la 7ème symphonie de Beethoven qui ferment le film parlent d’eux-mêmes. On a quitté l’ordre divin pour entrer dans la terreur humaine.
J'ai choisi quelques extraits pour parler du film et de son traîneau musical :
- La bande annonce
- Le chant incarné, d'une gravité qui s'accroche aux altitudes : "Voici la nuit "
- Le psaume qui trace le choix d'un lieu où tout commence : Ô Père des lumières
Le film s’inspire d’un événement politique : l’assassinat des moines de Tibhirine en Algérie en 1996 lors de la guerre civile algérienne.
Le film a fait connaître les problèmes algériens et leur situation politique, le drame de ceux qui vivent en terre algérienne et la vie religieuse des moines qui ont donné leur vie pour s’investir dans une mission spirituelle faite d’abnégation et de stoïcisme.
Ils ne pensaient pas que cela irait jusqu’au sacrifice total quand en refusant de fuir le pays, ils sont capturés, torturés et tués dans les montagnes de l’Atlas.
Tout se vit dans un monastère au milieu des montagnes de l’Atlas dans les années 1990 où huit moines chrétiens français vivent en harmonie avec les habitants de la région.
La guerre civile devient meurtrière et le choix de rester et mourir ou de partir et de tout abandonner devient le nœud cornélien et l’action éminente du film.
Ensuite viennent les deux scènes finales qui par le choix de la musique qui les accompagne suggèrent et amplifient les drames sous-jacents de l'humanité.
La bande annonce
Voici la nuit
Auteur: Didier Rimaud
Compositeur: Jo Akepsimas
Voici la nuit,
L’immense nuit des origines,
Et rien n’existe hormis l’Amour,
Hormis l’Amour qui se dessine : En séparant le sable et l’eau,
Dieu préparait comme un berceau
La Terre où il viendrait au jour.
Voici la nuit,
L’heureuse nuit de Palestine,
Et rien n’existe hormis l’Enfant,
Hormis l’Enfant de vie divine :
En prenant chair de notre chair,
Dieu transformait tous nos déserts,
En Terre d’immortels printemps.
Le psaume
Ô Père des lumières,
Lumière éternelle
Et source de toute lumière,
Tu fais briller au seuil de la nuit
La lumière de ton visage :
Les ténèbres pour toi ne sont point ténèbres,
Pour toi les nuits sont aussi claires que le jour !
Le cheminement
- En première partie, les paysages qui se posent avec lenteur s’harmonisent avec la gravité du mouvement spirituel. On entre dans l’absolu mouvement d’une sonate : des couleurs ocre dans la variété de nuances sable où le désert se profile quand les sommets des monts se penchent sur les quelques habitants, on sait que l’on commence un voyage. La grandeur et l’austérité des postures qui se jouxtent à la récurrence des gestes liturgiques des moines portent une vérité qui nous crucifie.
- Puis surgit l’élément déclencheur qui anéantit la paix sauvegardée dans l’isolement des collines. Le chaos, les violences, la guerre, les meurtres envahissent les champs, les couloirs du monastère. On se demande qui est Dieu mais pour les moines, il n’y a qu’un dieu auquel ils rendent grâces tous les jours.
- Dans une 3ème partie, quand la décision est prise de rester auprès d’un peuple qui souffre et d’accompagner leur destin, on assiste à la fin d’une offrande d’où la brusque apparition des mesures de la finale du Lac des cygnes pour signifier le dernier repas partagé dans un monastère qui a perdu sa neutralité et qui, selon la formule consacrée « Non pas ma volonté mais que votre volonté soit faite », les moines acceptent leur sort et rompent le pain de la Cène.
Et enfin l’introduction de la 7ème symphonie de Beethoven sonne le glas d’un accomplissement qui ne trouve sa réponse que dans la mort.
La musique a une grande importance dans ce film qui en s’inspirant d’un événement historique et politique, lui donne une toute autre envergure. Le chant des berbères dans leur quotidien, l’eau à puiser, les céréales à cultiver, les enfants étonnés mais rieurs, les femmes silencieuses, toute une vie dans l’ombre et l’effacement, le recueillement et la perpétuation de gestes millénaires se nourrit étonnamment de la liturgie prononcée dans le monastère au sein d’un groupe de moines.
Et la musique sait évoquer dans un silence implacable le feu qui couve, les pensées intimes qui n’osent se livrer, les convictions retenues, les désirs et le savoir de ceux qui savent sans dire ce qu’ils voudraient pour la sauvegarde de leur humanité.
Les moines ont trouvé, choisi, accepté ce qu’ils ont décidé de vivre et ce choix n’a plus aucune mesure ni dans la vie ni dans la mort.
Ils ne font que glorifier un dieu par des mâtines, des laudes, des vêpres, des cantiques et de s’abreuver à la source d’une vie et d’un ordre qui s’inscrivent dans les traces de leurs pas à mesure qu’ils sont emmenés jusqu’au lieu de leur achèvement.
1/ Le lac des cygnes de Tchaïkovski.
Cette musique est la scène finale du Lac des cygnes quand le Prince demande pardon à Odette qui meurt dans ses bras.
Cette musique est placée au moment du dernier repas des moines avant la nuit de leur enlèvement.
2/ La 7ème symphonie de Beethoven
Cette symphonie s'accroche aux pas dévastés des moines qui sont traînés dans la neige et
emportés vers leur destin dans les montagnes de l'Atlas.
Ginette Flora
24 Décembre 2024




On ne se lasse pas de tant de beauté en cette veillée de Noël... je te souhaite, chère Ginette, de chaleureux moments à partager 😍 🥂'(Et je vois que le Père Noël a mis au pied du sapin mon "macaron" 😎 !)
Que d'émotion au rappel de ces précieux d'amitié partagée ! les larmes me montent aux yeux !